Ce sont les combinaisons qui complotent, ce sont les faits mille fois recoupés, les faits sans cesse élagués pour mieux les simplifier, la machination des désirs qui n’arrête pas de retraficoter le réel et que celui-ci, enfin dépouillé de ses ombres finisse par monter en épingle, ce sont les mouvements électriques et numériques des pensées les plus plates avec les voix automatisées dans les perpétuels micros, les images toujours montées et démontées vitesses grand v, comme des armes à feu, ce sont tous ces flux sectionnés et racornis remis bout à bout et que ces manipulations, ces compositions machiniques habituels, finissent par faire exploser le cadre, que la mayonnaise monte et que l’actuel tourne au vinaigre, ce sont toutes ces opérations de bidouillages incessants sur la réalité pour la rendre la moins plurielle possible et la faire ainsi glisser dans des goulots de plus en plus étroits, ce sont tous les aboiements mortifères en écho sur des grosses chaînes câblées, des moteurs sans chercheurs avec diverses routines écrites avec les pieds pour que passe en boucle un réel tronqué, ce sont toutes ces pelleteuses d’émotions, les broyeuses d’idées noires, ce sont les expertises robotisées sur des signes insignifiants, le retraitement de l’oubli et la systématisation des vérités, la science et l’histoire qu’on fait tourner en eau de boudin et les avis éclairés stagner dans des sempiternels bassins de décantation, tout ça constamment repassé dans ces vieux tuyaux où coule avec régularité un même bruit, c’est toujours les tableaux infinis de permanences, les trois/huit dans la simplification du vivant qui finit par créer la peur extime de chacun, qui n’est d’ailleurs plus un chacun, mais un être évidé, un individu dévalué dans ses mots, dépossédé de ses errements, ses flottements, ses silences ou ses embryons de pensées, c’est tout ce sinistre sérieux passé au crible, mais un crible bon marché, c’est tous ces mouchoirs sales où s’abandonnent les pseudos analyses et s’alimente l’indignation, ce sont tous ces générateurs de bonne conscience couplés à des pools de recherche sans brouillon formatés en usine, ces fédérations de machines à écrire sans dactylos puis de compilateurs de données où ça torche un même journal à tous les quotidiens, c’est tout ce monde systémique puissamment armé de développeurs incultes, ce sont toutes ces parades qui se défilent, ces défilés dans la dérobade, les manœuvres laborieuses de tous les bruits de couloirs, grincements de portes et chuintements d’ascenseurs, la conspiration de divers appareils, machines à café et à jacter, imprimantes et crachoirs, outils à spéculer et potins en streaming, tous ces spams traduits en discours, cette chaîne de montage de bourrichons, ces fuitages décervellés et bombing de sermonts, toute cette soupe virtuelle et les protocoles d’inaction qui font que ça monte en flute, ça cogne l’opercule et que ça s’excite dans des tubes, puis qu’une mousse fleurisse enfin sur les bords d’une grosse cocotte minute, que ça flippe et ça crie, que ça file et se tend, qu’on entende ainsi des balles siffler, des pneus crisser, que ça explose et meurt et fasse un trou, un petit trou qu’on rebouche un peu vite avec ce même gratin marronnasse, cette colle granuleuse, mais que les trous s’ouvrent encore et que les bords s’abouchent, que tous les trous finissent par se toucher, qu’il n’y ait plus que ça à enduire, ces bords de trou qui sont un peu nous, que ça soit nous malgré tout et que ça nous déborde encore, mais qu’on ne soit plus que ce débord là d’un trou, celui d’où qu’on boute en touche.

l'humain conspire l'ennui

et l'ennui ne fait pas toujours transpirer

l'humain est le pire de lui

ou presque

il est lui dans sa version

débordée

c'est à cet endroit là que ça fuit

dans ses extensions

qui viennent lui capter ce vide

mais lui capte rien, il capte

pas que c'est là

où il prit la tengeante que ça cause

et débite et complote

après : soit on capitule, soit

on récapitule.