@Contact
Les poètes sont des prête-noms

 

Ce qu'on veut chasser dans moi c'est la bête

l'innommable bête

qui est tapie au fond

du cabanon

la vilaine grosseur qui remue

on ne sait où

et on ne sait quoi

avec son sale museau

et dont il va falloir

employer les grands moyens

pour se débarrasser

 

je suis l'espèce de l'humain

en voie de disparition

mais je ne suis pas un animal protégé

car nuisible à l'homme

je pue

j’ai des poils

je suis sale

et plein de poux

 

mes amis sont les rats

 

j’ai souvent des dents en or

et je vis comme un porc

à l'ombre de vos cités

 

l'homme est devenu un être à part

un héros ou un salaud

une sorte de brave type

(brave sans doute, à force d'avoir été tant salaud)

il tutoie l'honneur et le déshonneur

il est dans l'Instance

dans le Présent

dans l'heure H

et le jour J

il n'a que faire des cloportes

et des sans-langues

 

tout le continent aujourd'hui

et toutes les pensées et toutes

les institutions ont pris l'homme

à bras le corps

 

l'Idée est inscrite dans le marbre

et c'est au javel qu'on va nettoyer ça

ce trop

ce truc en trop

et qui pue

et qu'on appelait l'Autre

ou son double

 

 

entamer la procédure

sous un air neuf

avec des accents de jeune fille

qu'on prostitue

ou d'un vieil ours qui ne cherche

dans l'existence

qu’à tomber sur un tas de miel

 

l'art c'est aussi faire un tas

en toute innocence

et par défaut, incapacité

et parce qu'on est le dernier des couillons

une apacherie sans gauche ni droite

ni devoir ni honneur

ni saloperie sans nom

 

 

 

la cerise

Parfois ça se termine en queue de cerise aussi. Donc il faut juste appuyer ce qu'il faut. Il faut juste caresser la cerise en fait. C'est bon de savoir qu'on peut caresser une cerise comme on veut sans savoir comment ça va finir. ça finira par une descente sans doute. à moins que ça nous remonte déjà. on descendra mais sans dévaler une pente. C'est bon de savoir qu'on vit grâce à une cerise. Grâce à son inertie à l’évènement. Si je caresse cette cerise c'est que je suis en vie. C'est ce que je me dis. Je me dis si je suis prêt à frôler la cerise c'est que je suis encore vivant. Je sais combien il est important de le savoir. On regrettera peut-être un jour ce moment où je caressais cette cerise sans y penser. Alors j'y pense. Comme ça je ne le regretterai pas. J'aurais pu y penser avant. Penser aussi à ça en d'autres moments. Au lieu de ne penser qu'à moi. J'aurais pu ne penser qu'aux cerises. Je me serais dit finalement je suis en vie. Quoique je fasse. Je ne regretterai pas aujourd'hui de ne pas y avoir pensé hier. Puisque je le pense aujourd'hui. Je le pense plus qu'hier. Plus je pense et plus je me fais de la bile pour demain. Le fait de regarder précisément cette cerise me fait souffrir atrocement. Je ne sais pas ce qu'il adviendra après. Quand je l'aurai oubliée. Je ne sais pas si ce sera encore pareil. Peut-être qu'on changera un jour. On ne préfère plus y penser. D'habitude on appuie sur une cerise et on s'intéresse peu à ce qu'il advient ensuite. après l’avoir mangée. Est-ce qu'il y a quelqu'un qui mange d'une autre façon que moi cette cerise. Est-ce qu'il y a quelqu'un qui se questionne autant que moi face à un fruit. Est-ce que quelqu'un peut autant souffrir que moi en la voyant. Est-ce que quelqu'un souffre déjà rien qu'en se voyant lui-même. lui-même en cerise. En se voyant appuyer dessus. En se voyant la caresser. Est-ce que quelqu'un la caresse autant que moi. Est-ce qu'on s'en sert uniquement pour manger. Moi je m'en sers pour penser. Je pense à cette cerise dès que je la touche. Je me dis à cet instant là comme c'est merveilleux. Je suis en vie. Je continue à caresser la cerise. Je pense. Bientôt elle sera différente la cerise. Ou alors c'est nous qui auront changé. On aura d'autres chats à fouetter. Chacun fait ce qu'il a à faire. Moi je pense à ma vie. La cerise pense à son noyau. Ou alors quelqu'un y pense fortement aussi. Tout le monde s'est sans doute un jour arrêté sur un noyau pour se poser des questions. On se pose des questions devant tout un tas d'objets usuels. Aujourd'hui je me pose des questions sur le noyau de la cerice. ça change. Grâce à lui je me pose des questions sur qu'est-ce qu'il fout là. Qu'est-ce que j'en ai à foutre des noyaux. Je me fous de savoir si quelqu'un va de nouveau bouffer de la cerise. Je me fous pas mal de savoir si la cerise sert à autre chose qu'à faire un noyau dans la pensée. Ça résiste à la pensée. Ça fait des noeuds dans la tête. J'ai mes noeuds ils sont nombreux alors je peux tout dénouer pendant des heures sans embêter personne ni même appuyer sur un quelconque noyau de cerise. Je peux vivre dans ma pensée tout seul en me passant de noyau. on se passe de noyau comme on se passerait de vivre. Vivre avec des cerises. Je voudrais vivre dans ma pensée seule. Je voudrais être seul en elle. Je voudrais qu'elle me pense et je voudrais penser en elle. Je voudrais qu'elle m'habite et je voudrais pouvoir penser en moi pour moi seul. Je voudrais être le seul à me faire savoir dans ce foutu pétrin. Je veux créer mon propre pétrin à moi et me faire savoir par moi seul. Je veux me faire à moi m'avoir dans mon savoir. Je veux pétrir un moi à moi et penser les noyaux de la tête pour moi seul. Même si les noyaux viennent parfois d'elles ils viennent aussi de moi. Ils sont pour moi seul. Tout au moins je voudrais le croire. Je pense qu'ils veulent tous que je pense pour moi seul. tous les noyaux. Le fait qu'ils veulent que je pense pour moi seul fait que ça pense autrement en moi. Ça me fait penser différemment de moi à moi et vice et versa. Ça me fait me faire voir ailleurs en moi autrement. Ça me fait que je me fais de la bile autrement pour lui que pour moi. Pour moi je me serai fait moins de bile. J'aurais fini par comprendre qu'il ne voulait pas de moi. Ce moi qu'il voulait de lui seulement. C'est moi qui voulait de lui. On se le voulait pondu par nous. On voulait se pondre un nous dedans pour soi seulement. C'est lui qui le disait à moi. Qu'il se voulait pour lui seul en lui-même et que j'aille me faire voir chez les grecs. Seulement je ne me ferai pas voir chez les grecs comme ça. Je résiste à moi. Je ne veux pas m'en aller comme la cerise s'en est allée. On l'a su quand il tripotait cette fichu cerise. on a su tout de suite où ça devait l’emmener. C'est la cerise qui l'a emmené quelque part. Il voulait faire un tour. Il voulait prendre l'air. La cerise n'était pas contre. On aurait voulu voir ça. Seulement vous avez manqué le début. Peut-être qu'un jour on nous expliquera tout sur la fonction de sa cerise. Peut-être qu'il a des fonctions bien à lui qu'on ne connaît ni d'Eve ni d'Adam. Peut-être qu'Eve ou Adam avait déjà des cerises et ça les aidait à penser. Ils pensaient être deux à cette époque. Ils ne pensaient qu'à eux deux. Ou alors ils étaient à deux doigts de le penser. A force ils auraient pu être à deux doigts de le croire. A force de penser pour eux deux ils auraient dû finir à un. Ils auraient fini tout seul à force. Mais ils ont fini à plusieurs en chacun d'eux. Et il n'y avait rien pour dire pourquoi ni comment. Tout le monde cherchait et à force de chercher le pourquoi du comment les rangs grossissaient et on ne voyait plus rien dans la pensée. Car elle était remplie de noyaux. On faisait de grandes découvertes. On avait la pensée qui tournoyait dedans. Et on ne savait pas comment l'attraper alors on ne l'a pas attrapée. On l'ai laissée paître dedans. ça a grossit longtemps. Comme dans mon ventre. Elle était rose. On pouvait lui faire des guili-guili. Non. Je ne crois pas qu'on pourrait lui faire des guili-guili en vrai. En vrai la pensée n'est guère pour les guili-guili. C'est dommage car c'est bien les guili-guili. 

 

le sentiment continué

le sentiment

 

 

le sentiment. le bon senti. la mentirie. la mentirie de ce que l’on sent. on se sent mentir en dedans. tout le mensonge bien senti. bien développé, pour sa personne. sa petite personne qui glisse dans la vie. la vie les événements. les événements ne vivent aucun sentiment. c’est l’image de la petite personne glissante. la personne pimpante de senti et de mentirie. la mentirie des images pleines et bien senties. comment je me sens mieux quand je glisse. c’est en glissant dans le sommeil des événements. car les événements nous font dormir. notre conscience nous évanouit. c’est le lieu même de notre évanouissement dans les sentiments. c’est le sentiment qui est bon, il n’y a pas à spéculer pour le senti. ne pas reculer dans le sentiment. c’est comme s’enfoncer dans de la matière pour être. on est pleinement reçu par soi, mais soi n’a pas d’odeur. c’est comme l’argent. l’argent c’est lui qui fabrique tous les sentiments. et les bons événements où s’y promener consciemment. conscient et senti et ment. les gens se déplacent à l’intérieur d’une musique d’événements. ils se remplissent les poches comme ils peuvent les gens. il nous faudrait plus de poches à événements. il faudrait plus se remplir les fouilles en ce moment, c’est-à-dire glisser et rêver et se laisser à la mentirie. la mentirie des sentiments et des passions. il n’y aurait jamais dû y avoir ce mot. le mot passion n’aurait jamais dû passer à ce moment-là. pourquoi le mot passion est passé par-là. je n’y peux rien. j’ai cru que je parlais de sentiment dans l’événement. j’ai cru me remplir les fouilles argent comptant. espèce sonnante et trébuchante. et me voilà comme ressenti, bloqué sur la passion, comme si je franchissais une crête. il faut que j’aille de l’autre côté maintenant. maintenant j’engage mon personnage à la perte. plus rien lui correspond. il se des-implique amplement de son petit carré personnel. car en fait il s’agit bien d’un carré. de quelque chose de concret. et la chose concrète, c’est qu’il ne suffit pas de se mettre en quatre, mais de se mettre à baiser, là, juste devant vous, pour vous prouver tout le contraire de ce qui a été avancé jusqu’ici. oui, une bonne et vraie mouvante baise. bien ragoutante. avec des personnages qui en ont gros sur la patate. avoir pu vivre jusqu’ici dans les voyages et les heurts de l’existence, alors que l’existence n’est qu’un boudin où il faut forcer le passage. c’est-à-dire rentrer à coup de bélier dedans, forcer la bête à se mouvoir et agiter ainsi les chiffons rouge de la vie. les chiffons et les petits trucs en plis sexuels. les petites pliures qui n’ont rien à nous offrir que leurs petits trucs. c’est pourtant avec tous ces trucages que nous nous sommes pliés et que ça à chauffé ainsi notre petit cœur, précisément. c’est exactement à cet endroit, à l’endroit du petit cœur, lorsque j’ai appelé cette petite poulette qui avait des gros bras et des cuisses d’homme du sud. effectivement, je ne me doutais pas que j’allais rencontrer ma poulette du sud à l’intérieur même de mon passé. car c’est là que je la voie le mieux ma poulette du sud. qui est-elle, sinon le produit édulcoré de quelqu’un de très proche dont je tairais pour l’instant le nom, pour les besoins de la production. je n’ai pas dit : la reproduction. j’ai pensé plutôt à la production de la science. sinon, je vais dire qu’il s’agit d’une belle petite poulette sur un vélib et qui va jusqu’à voyager dans la forêt pour se faire déflorer. il suffit de dire ça et déjà la théorie de nous-ne-baiserons-pas-ensemble a fait son petit tour. nous-ne-baiseront-pas-ensemble, ou alors jamais qu’un œil borgne. cette théorie est déjà révolue. il suffit de s’avouer un peu à soi-même que toute exploration temporelle croise des choses inavouables. que n’importe quel artiste, même le plus avenant, le plus plié dans ses questions, ses obsessions, ne peut même pas connaître ses intentions. et c’est pourtant ainsi que tout a commencé. fin du premier chapitre. la version est mauvaise. il faudrait reprendre le chemin. refaire ce petit tour en bicyclette. comment s’appelait ce petit chou inconscient. cette petite fleur de l’âge. comment s’appelait déjà cette figure qui nous semble si proche. c’était une humaine. les humains, c’est le genre qu’on connaît le mieux. ils naissent des atomes. ils sont de la chair des étoiles et pourtant ils s’imaginent que tout ne finira jamais dans un magma sans nom. ils s’imaginent tout et son contraire. ils n’ont envie que d’une seule chose : avancer à perte de vue. ils n’ont pas conscience que ce qu’ils font c’est du retraitement. jamais de perte. toujours retraiter. c’est ça la société humaine. elle retraite elle retraite. elle n’en peut plus d’avoir tant de mots à dire. déjà du temps de la rome antique, tout n’était que tuyaux et opérations de transvasement. et aujourd’hui pareil. vous allumez la télé, vous voyez les mêmes qu’hier. retraitement de l’information, comme ils disent. tout comme la merde dans les tuyaux. tous les tuyaux merdeux c’est pour le bon fonctionnement de la société humaine. et donc cet humain lui, ou plutôt c’est une humaine, débitait sans conscience de la perte. combien on en a perdu comme ça. combien d’êtres humains ou alors d’atomes. car tous les atomes se sont rassemblés un jour. il se peut que ça nous poursuive ces histoires. en tout cas c’est pas demain la veille qu’on va se taire une bonne fois. une bonne fois pour toute lui fermer son clapet à cette folle. car pour elle tout ce qui est extérieur à la parole se dit aussi dans la voix. toute la voix reproduit tous les gestes et les choses qu’on fabrique en dehors de la bouche. et pourtant, tout ce qui est dans la bouche est ce qui fait le dehors. c’est ainsi. on y échappe pas. en dehors de tout mot il y a la voix, qu’elle dit. car la voix dit tout ce qui pourrait être fait dans l’espace. mais là, il faut le reproduire dans la voix. et la voix s’exprime à elle seule ce qui a été acté dans toutes les vies. tous les actes sont reproduits dans une seule phrase. nous sommes des professionnels, dit-elle.  ne reproduisez pas ça chez vous. quelle foutaise cette bonne femme. elle n’a jamais eu le bon mot au bon moment. jamais moyen d’entendre la raison résonner là-dedans. c’est comme un puits de lumière. elle cause et ça remplit rien. c’est du vide. on n’a jamais connu un tel vide. peut-être quelque part. au fond de je ne sais quel trou théorique il y a pareil vide. mais c’est peu probable. on ne sait pas ce qui le retient de l’écouter. ça parle ça parle et ça écoute ça écoute. combien de temps encore à rester planté devant des questions qui n’en sont pas. la jeunesse est vraiment plombante. pourquoi tant de plomb finalement ? à qui est destiné tout ce plomb. la jeunesse nous plombe. c’est les années de plomb la jeunesse. je m’en souviendrai de ces années avec elle. c’est encore dans la bouche. c’est notre pain à nous deux. et ça s’enfourne dans la jeunesse. car la jeunesse est lourde et pleine. tout tient dans la bouche. c’est lourd. c’est du plomb. la jeunesse embraye. la jeunesse plombe. oui. on l’a déjà dit. oui. mais l’amour on n’en a jamais autant parlé la bouche pleine. et c’est bien de cela qu’il s’agit en vérité. en vérité, il s’agit même plutôt d’un petit chien qui nous suit sans cesse. on a beau quitter la place à une heure tardive. le voilà qu’il rapplique illico ce petit chien. comme j’ai aimé ce petit clébart à la voix qui tremblotait entre deux rames de métro. je le vois encore me supplier avec ses beaux petits yeux de le prendre. mais de la merde. qu’il aille aboyer son mal-être ailleurs. les gens sont dans un de ces mal-être ces temps-ci qu’il faudrait tous les nicher dans notre vie. leur trouver une raison d’être. ce sont des petits chiens rien d’autres. il ne font qu’aboyer de l’amour à tour de manivelle. mais nous ne voulons plus des animaux en laisse. nous voulons des animaux anti-chien. nous voulons des meutes. et c’est pour cela que nous voulons embrasser tout ce qui se présente à nous. car tout ce qui se présente à nous forme une meute, à la longue. même si c’est une image. c’est la nôtre. tout tourne autour de notre image de toute façon. nous ne pouvons pas faire un pas dehors sans se retrouver face à face avec soi-même. cette face où nous stationnons. faisant le beau. nous faisons toujours le beau face à nous-mêmes. quand est-ce que tu viendras me donner la petite papatte à son mémaître ? jamais de mémaîtres. que des poils rèches et drus. que de la carne de chien errant. et même pas de chiens. que de l’errance à poil. dans la forêt de soignes. va donc un peu te faire soigner à soignes avec tes amis de la branche des joyeux drilles, je lui disais. je l’aimais pourtant. quand elle est partie. quand elle m’a dit je te quitte, dans l’escalier qui puait. car cet escalier puait de plus en plus fort. le voisin d’en dessous mettait un temps fou à fermer sa porte. on appelle ça des toques. il toquait sur sa porte. je veux dire qu’il voulait la fermer avec sa toque. ça durait une demie heure environ, jusqu’à ce que je me décide à sortir pour lui faire peur. je sortais et il s’enfuyait emportant sa toque avec lui. ensuite je rentrais chez moi chasser la souris. car il y avait beaucoup de souris dans cette turne. j’étais chargé de les expédier en enfer. mais je n’y arrivais pas. je suis sensible aux petites bêtes. la fois dernière elle m’a trouvé une bête dans le jardin du propriétaire. elle ne bougeait plus, comme morte. bon débarras. mais je ne suis pas comme ça. je suis sensible. j’ai les sentiments qui me débordent alors j’en fais profiter les petits rongeurs. je l’ai soignée. je voulais la prendre chez moi mais elle ne voulait pas, alors je l’ai soignée, le temps qu’elle se remette. c’était une sorte de petit rongeur avec des marques noirs autour des yeux. une vraie tête de bandit. on appelle ça un lérot. il a sauté un jour de sa boîte car la voisine voulait le voir et j’ai enlevé trop vite le couvercle. c’est d’ailleurs elle qui m’a dit que c’était un lérot. j’aurai plutôt cru un loir. ou un mulot. c’est elle qui m’a fait penser à ça. elle me fait toujours penser à un mulot. je baisais un mulot à l’époque. à coup de balais. ne riez pas. ça n’a aucun rapport entre la baise en fait. c’est juste par rapport au coup sur le trombine. il n’y a d’ailleurs aucun rapport entre moi et ce mulot, à part qu’on n’avait déjà aucun rapport avec nous-même. tout petit déjà, je n’ai jamais cru en moi-même. je veux dire en cette personne en qui je stationne. je n’y ai jamais cru. je me suis toujours demandé pourquoi on m’avait mis là-dedans et pour quelles raisons je devais être enfermé dans une personne qui serait moi. quand j’étais petit j’avais comme ça des sueurs froides. je me trouvais dans la cour de récré et je regardais les autres se faire avoir. en tout cas, c’est ce que je pensais à l’époque, sans doute à tort. ils se se sont fait avoir par tout ce qu’ils compilent à l’intérieur pour ressembler à un quelqu’un. ils se font berner. ils semblent croire en eux alors que moi je n’y crois pas une minute. je ne croyais pas en eux une minute en ce temps-là. et encore moins en moi. je regardais, mais derrière mes yeux il n’y avait personne pour attester un quelconque sentiment d’existence. 

foutu pour foutu

 

c’est foutu. on n’a plus rien à dire. on est foutu pour la causette. ou bien c’est de la parole. on nous aurait causé de cela. qui on. qui c’est ce on qui s’est foutu en travers de nous. c’est-à-dire de la gorge. à moins que ça soit une route. ils passaient tous par là. ça n’en finissait plus. les on. ça causait ça causait. un vrai chahut bahut. je sais pas si on dit ça. ils nous l’ont répété tant bien que mal pourtant. tiens-toi bien à table. à la table des négociations. ou plutôt dans tes mots. négocie bien les virages. tiens bien le verbe haut. c’est ça qu’ils nous serinent tout le temps sur cette route. et il faisait beau ce jour-là. c’était une route ensoleillée. on pouvait s’y promener. on voyait les gens sortir. ils s’amusent comme ils peuvent. ils balancent leurs querelles à l’envie. un des passants dit qu’il va au bureau de vote. un autre le suit. ils sont tous à s’y fourrer. tout le monde au bureau de vote aujourd’hui. ça m’a jamais excité moi l’ambiance des bureaux de vote. pourquoi aller voter. pourquoi pas y aller. tiens et si on y allait. on pourrait avoir une idée. dans l’isoloir. pas d’isoloir qui compte. je tiens la route. et elle est encombrée. pourquoi ils nous encombrent avec leurs idées. pourquoi ils nous foutent pas la paix. retournez vivre dans vos caves qu’ils disent. ou c’est dans des grottes. allez repeindre la girafe qu’ils nous répètent. tout ça c’est des boniments. ils ont assez causé. et beaucoup causé de mal en plus. plus ils causaient mal et plus ça en causait sur les bords. tout le monde fut éclaboussé. pas moi. moi j’ai maintenu le chemin. c’est-à-dire j’ai creusé en plein milieu. je suis sorti des comptes. je n’étais même plus comptabilisé. seulement ça ne servait à rien. ne pas être sur la liste. ça la fout mal. faut repartir à zéro. reprendre le baluchon et y aller. s’investir. sinon comme je dis c’est cuit. on nous passe plus rien. faut jouer à l’écouteur public. faut faire marcher les gamelles. et elles sont nombreuses. combien de gens qui causent ici. en plus d’ailleurs. déjà ailleurs ça doit causer aussi. un brin aussi ça cause ailleurs. mais on sait pas où. ici on ne s’occupe que de cette route. une grande trajectoire. une autoroute. mais elle est trop fréquentée. allez trouver votre chemin là-dedans. c’est comme une aiguille dans une botte de foin. tout le monde mange ce foin-là et y prend goût. c’est comme une passion. un violon d’ingres. c’est comme la politique. à part le foot la politique intéresse tout le monde. c’est-à-dire une sorte de parler qui convient avec des mystères qu’y nous faut. il en faut pas plus. si le mystère s’épaissit il n’y a plus grand monde. tout le monde a un truc à faire. même les grandes inventions il a fallu les trafiquer. même les plus grandes idées. les plus grands projets humain il a fallu les soustraire à l’opinion pour que ça devienne un galimatias pour la langue de chacun. c’est-à-dire la langue de tout le monde. que monsieur chacun-tout-le-monde se retrouve dans la langue de personne. même les plus grandes découvertes il a fallu les débiliser un bon coup. car sinon ça ne tenait pas dix ans. on croit toujours que c’est l’inverse qui se produit. alors que tout est fait pour diluer le moindre propos dans la plus sinistre des farces. et tout le monde marche dedans. ça porte bonheur croit-on. en tout cas on ne sait pas encore vraiment à quel moment ça s’éteint. ça s’éteinT quand dans la tête à chacun une idée. une simple idée sorti d’une cervelle plutôt bien faite. comment ça tombe dans l’oubli à tout le monde. à quelle vitesse et à quel rythme. avec quelle intensité la tombée dans la déconnade globale. combien coûte la chute d’une pensée. on se le demande jamais. combien ça coûte pour l’humanité. le mot est tombé au bon endroit. rien que ça. il est bien tombé dans la tête à quelqu’un de parler d’humanité à un moment pareil. et ça nous tombe de où tout ça. dans quel endroit la chute définitive du concept. ça tomberait dans quel trou et pourquoi faire. pourquoi ne pas rester au bord. pourquoi ne pas repartir du bord. sous un œil neuf. un œil ou un nerf. c’est un air neuf qui nous fait repartir. mais la chute sera peut-être encore plus grande. plus intense la prochaine fois. le prochain renouveau. le changement comme ils disent. le renouvellement complet cette fois-ci. c’est annoncé partout. il est temps de tout revoir à zéro à l’aube de demain. la continuation ou la révolution. à vous de choisir. à quel moment tourner cette page. cette lourde page. à moins de laisser tout ça tomber une bonne fois. mais le trou ne voudra pas de nous. hors du trou point de salut. et pourtant on ne peut que rebondire à sa surface. car à l’intérieur c’est le néant. mais pour accéder au néant il faut vouloir exister. et plus on s’approche de sa propre fin et plus on veut exister. plus ça nous démange. la révolution est proche. demain n’a jamais autant été un presque aujourd’hui. on le dit même gravement. le renouveau c’est déjà aujourd’hui. et demain c’est déjà trop tard. à quelle vitesse la chute d’un corps. avec quelle énergie tout ça est propulsé. ça n’est pas qu’un corps qui fuit sa présence. c’est tous les corps ensemble. ou plutôt différends ensembles de corps. comme des pensées. à quelle vitesse ça tombe. à quel rythme la pensée. à quel moment ça se fissure. à quel degré ça pète. et que ça finisse par s’écraser en lambeau dans la tête des autres. et comment faire évoluer tout ce ramassis après. on ne le sait pas ça. quand après ça refroidit. car toute idée finit par refroidir. au tout départ on nous dit que ce fut plutôt chaud. ça chauffait bien au tout début. on l’a échappé belle nous disent les penseurs. puis après cette croûte se durcit. un bon temps à se geler ainsi dans tout un peuple. jusqu’à l’explosion. allez comprendre pourquoi. jusqu’à l’effondrement total. mais tout effondrement ne conduit nullement au néant. le néant on ne sait pas par où ça sort. on sait que ça disparaît mais pour aller où. en tout ça dès que ça tend à battre de l’aile et à s’effondrer les choses commencent seulement. c’est là que la vie nous apparaît. un nouvel élan qui fuse. à quelle vitesse de propulsion ça gicle. certains avancent des chiffres qu’il faudra convertir dans sa propre tête. tout ça finit par nous dépasser. dans un espace plus petit qu’une cervelle une pensée s’illumine. une intensité un million de milliards de fois plus présente que dans tous les autres cerveaux réunis. on peut alors considérer qu’il s’agit du noyau de l’existence. c’est là où ça devrait se tramer pendant un bon paquet de minutes. et c’est pas des minutes-lumière. avant que ça ne se déplace. que la vitesse de la chute et que la température ne se stabilisent. que ça nous gèle sur place. et qu’on soit proche d’un ordre calme et neuf. c’est-à-dire loin des crises et proche de la mort. juste avant que ça n’accélère encore un bon coup. à l’horizon des emmerdes. 

 

trop

MANIFESTE POUR QU’ON NOUS FOUTE LA PAIX

 

Je trouve que vous êtes trop. Trop beaux. Trop dans le faire. Et dans le faire beau. Trop dans le savoir. Vous êtes trop dépositaires. Vous allongez trop. Vous aimez trop l'épaisseur. Trop la logistique. Vous êtes trop techniques. Alors vous faites des blocs. Des monolithes. De la morale. Mais laissez-nous vivre. On s'en fout des dépositions. On veut la vie. On veut respirer. Et si la littérature nous en empêche, on ira voir ailleurs. On veut inventer. On veut inquiéter. On veut foutre la zone. La vie nous appelle à la zone. Au naufrage de nous-mêmes. Nous sommes des êtres qui de toute part déconnons. Nous déconnons de toute part et ça ne fait que commencer. La déconnade est la seule contre mesure. La contre mesure face à ce qui nous est dit, dans la littérature et ailleurs. Votre pensée est la mesure qui convient trop à notre temps. Et il faut en découdre avec le temps. L'homme est un être qui déconne de toute part. C'est pour ça qu'il faut écrire des manifestes. Des manifestes pour qu'on nous foute la paix.