- c'est comme des parasites !
- ouais ! On est des parasites et on fait bip dans le discours.
- c'est comme des parasites !
- ouais ! On est des parasites et on fait bip dans le discours.
merci jann-marc rouillan, car sans toi je n'aurais pas penser à écrire un livre, je n'aurais pas eu l'idée d'un livre où j'apprends à dire lentement les choses, un livre où je vais parler des amitiés, des amis et des ennemis, grâce à ton livre "autopsie du dehors", j'ai pensé à l'amitié profonde. j'ai pensé à ces deux mots associés : "amitié", "profonde". et ça m'a fait cogiter. est-ce que j'ai eu de vraies et sincères amitiés? quelles sont mes amitiés profondes? n'est-ce pas dans l'amitié profonde que naît aussi la colère, la haine et puis l'amerdume. oui, on a été ami, on n'est plus ami, ou alors on n'est plus ami que d'une image, d'un passé. ami des ombres. merci rouillan car souvent tu parles des gens et tout de suite, en deux mots, ils sont magnifiés. mais lorsque j'ai pensé à l'amitié, j'y ai vu des livres. l'amitié pour des livres et pour la personne dedans qui les a écrits. parfois cette personne est donc prisonnière de ces livres-là. l'amitié est maintenant pour moi essentiellement dans le souvenir. est-ce que j'ai encore des amis ("potos", comme disent certains personnages de ton livre) ? je veux dire : est-ce que je suis encore capable d'être bouleversé par quelqu'un, quelqu'un qui changerait ma façon de penser, qui m'encoragerait (et dans "encourager" il y a rage) à revoir ma copie du vivant, à faire autre chose de moi, à partir à l'assaut sans savoir vraiment ce que je fais, à être brouillon à en piquer un fard, à pas savoir expliquer, à être nul sans en faire tout un programme artistique, sans posture puisque complètement dépossédé, essayant juste d'apprendre à écrire et à vivre, à nouveau. toi, c'est ce que tu fais. "autopsie du dehors" (al dante, les illustrations sont de mc cordat), c'est vraiment l'histoire de quelqu'un qui réapprend à vivre, c'est-à-dire à écrire, car c'est par ce biais-là que passe ton inquiétude : "l'agencement d'une phrase entre deux points est (aussi) une prison", écris-tu page 66 de ton livre. merci donc, pour ce livre que j'aime lire et qui me donne des élans et un début de courage. car si j'ai du courage, j'écrirai sur l'amitié (j'aurais des amis).
L’art de vivre
(texte pour Dominique Jégou)
je pus
je pus mais
je pus peu
j’aurais pu pouvoir
j’ai même bien pu un peu
mais je pus toujours que peu
toujours trop peu je pus
et maintenant tout pareil
pareil maintenant que le pus d’hier
le pus peu et le peu plus
pas plus
le peu qu’il put pas plus que le peut peu
ou : pus peu
pus peu pas plus
car le peut peu encore moins
que du pus peu peut-être
pas pus plus hier
et moins que demain
moins de peut peu ou pas trop plus
j’ai pas trop plus de peu
que quand j’avais pu peu
tout ça trop peu
et aujourd’hui
aujourd’hui je peux peu tout pareil
voire pire
c’est pire que quand je pouvais peu
car quand je pouvais peu déjà
j’en pouvais plus
déjà quand je pus peu
j’avais conscience de tout ce peu
qui pourrait moins
encore bien moins
que le pus peu d’hier
tout le pourra de demain
car déjà aujourd’hui
j’en suis réduit à très peu de peu
aujourd’hui je peux encore moins que peu
aujourd’hui c’est peau de balle
si on veut plus que peu
même moins que peu on pourrait plus
on peut déjà presque plus
on est rendu au moins que pis
et c’est à prendre ou à laisser
et ça laisse peu de place à plus
et déjà c’est plus que peu
c’est plus que peu et c’est pas peu de le dire
Livre qui paraît chez Al Dante ce mois-ci.
Textes écrits autour du bâtiment administratif de l'écluse de Kembs / Niffer
Architectes : Georges Heintz & Anne-Sophie Kehr
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laurent m’avait dit, pour un manifesten poétique, c’est l’idéal, sauf pour les erroristes, ça manque un peu de caméra de surveillance, mais si y a que ça je vous emmènerai bouffer une tarte flambée à mulhouse, au moins là-bas on en trouvera à la pelle des caméras, alors qu’ici c’est la pleine campagne, avec une belle écluse et ce superbe bâtiment que j’avais cherché sur wikipedia, pas moyen de savoir, on ne parle que d’un bâtiment administratif datant de 1961 à côté de l’écluse et qui serait aussi de le corbusier, il n’est jamais question de cet autre architecte dans wikipédia, heintz, georges heintz, je l’ai même cherché sur facebook, il y est pas, sauf une page qui lui est dédiée : « pour que georges heintz se mette sur facebook qu'on puisse devenir ses fans ». c’est même écrit juste en dessous : « pourquoi nous ne pourrions pas cliquer sur "devenir fan" en cherchant georges heintz??? et d'ailleurs pourquoi n'y a-t-il pas de georges heintz sur facebook ??? ». on le voit en photo avec ses lunettes noires, il fait plutôt rock’n’roll, je le vois aussi en photo avec anne-sophie kehr, il a l’air de travailler souvent avec elle, ils font très rock’n’roll les deux, laurent me dit qu’il va venir pour le premier jour de ma résidence ici, avec ricciotti, en tout cas ce qu’ils ont fabriqué est plutôt réussi, c’est beau sans être une architecture à l’épate, cependant c’est pas très pratique pour les performances poétiques, surtout si tout kembs et niffer se pointe, il va falloir assurer des roulements avec cécile richard et édith azam, mais un peu comme dans la caravane des poètes au triangle, fallait lire plusieurs fois de suite pour que tout le monde puisse assister à une lecture, du coup stéphane nowak lui il va devoir ramener plusieurs tomes de saussure s’il veut assurer, vu qu’il a prévu de découper au hachoir son saussure, quant à moi j’ai qu’un rouleau de papier, je vais le dérouler depuis l’écluse et puis rentrer dans le bâtiment tout en écrivant, ou sinon je fais un coup de mégaphone pour faire venir les gens, allez allez, on y va, on se révolte, tout ça dit comme quand maman réveille ses petits, allez allez, c’est l’heure de se révolter, on y va, on n’attend pas les autres, il est super lumineux à l’intérieur le bâtiment, c’est à cause des vitres, cécile elle connaît bien, elle était dans l’architecture avant, dès qu’on est arrivé cet après midi elle m’a dit, tu as vu ces ombres portées, avec tous ces trous dans les panneaux ? et à l’intérieur on dirait que la nature est décuplée, j’adore les espaces lumineux comme ça, au début moi je me croyais au palais des glaces à cambrai je lui dis, en plein quinze août, le palais des glaces ? c’est à versailles, non ? ouais, mais à cambrai le palais des glaces c’est pendant la ducasse, c’est un labyrinthe avec que des vitres, mais t’as vu ces panneaux avec l’ombre portée qui viennent dessus, ça vient du toit toutes ces stries, de loin je croyais que c’était du bois, en fait on dirait des claustras, des claustras ? ouais, je crois que c’est comme ça qu’on dit, c’est des panneaux perforés, ici c’est de l’acier comme rouillé avec des trous, moi ça me fait penser aux moucharabiehs, tu sais à l’institut du monde arabe ? ah bon ? jean nouvel il a utilisé la technique du moucharabieh, les parois elles s’ouvraient selon la lumière, ah ouais ? ouais, à l’institut du monde arabe il a fait ça jean nouvel, et là c’est pareil avec les p’tits trous, tu peux voir dehors sans être vu, et du coup de l’extérieur on voit pas toute cette lumière grâce au puits de lumière, et ça reflète sur toutes ces parois de verre là, ça fait des espaces modulables en verre, la lumière rentre de partout, c’est beau, et t’as vu le plafond on voit encore les marques du coffrage, ça fait penser à l’émission qu’on a vu l’autre jour, laquelle d’émission ? à la télé sur une église faite en béton armée, perret qu’il s’appelait l’architecte, ah ouais, comme benjamin péret, mais lui je sais plus son prénom, tout en béton le coffrage de l’église, tandis que là c’est béton, verre et acier, et puis c’est tout plat, ça suit l’horizontalité du canal, ouais carrément, moi ça me fait penser avec juste ce petit niveau au-dessus du bâtiment à un bateau, ben à une péniche quoi, oui sans doute, c’est comme une péniche, et la lumière avec tous ces reflets ça fait un peu penser à l’eau